[Lauriane Amico] Sur le sujet de la santé mentale, c'est effectivement une question que je me pose souvent. Jusqu'où est-ce qu'on doit aller en tant qu'employeur ? Quelle est notre responsabilité ?
Est-ce qu'on doit accompagner des événements de la vie personnelle qui, on le sait, peuvent avoir un impact sur la vie professionnelle ?
[Justine Dalmas] Bienvenue sur le podcast Cultivons le Bien-Être & la Prévention de WTW.
Le podcast dédié à l'accompagnement Santé, Bien-être, Prévention et Équité.
Dans un environnement professionnel où l'attraction et la rétention des talents sont les maîtres-mots, construire et développer une politique de bien-être semble incontournable.
Que vous soyez DRH, manager, salarié, dirigeant d'entreprise ou encore partenaire social, nous avons conçu ce podcast pour vous offrir des perspectives inspirantes, des conseils pratiques et des histoires captivantes. Tout au long de cette série, notre experte sur le sujet chez WTW, Géraldine Guimaraes sera accompagnée d'invités exclusifs sur des thématiques précises du bien-être et de la qualité de vie au travail.
[Géraldine Guimaraes] Bonjour Lauriane Amico.
[LA] Bonjour Géraldine.
[GG] Vous êtes gestionnaire principale des relations avec les employés et du changement. Un mot sur Louboutin et vos responsabilités ?
[LA] La maison Louboutin a été fondée en 1991. Et est notamment connu pour son escarpin à la semelle rouge. Mais pas que, puisqu'on a aussi une collection pour homme qui est un peu moins connue. Et une collection également d'accessoires de maroquinerie.
[GG] Ok, j'ignorais effectivement pour homme, mais je pense que tout le monde aujourd'hui connait Louboutin.
[LA] Effectivement. Et j'ai rejoint cette maison dont il y a environ sept ans.
D'abord en tant que juriste en droit social, puisque dans une première partie de carrière, j'avais été avocate en droit du travail. Et puis au fur et à mesure des années, des opportunités et des formations, j'ai pu élargir mon champ de compétences. Et donc, je suis aujourd'hui responsable au global des relations sociales et du changement, essentiellement pour le siège parisien.
[GG] Avant de rentrer dans le vif du sujet, on a nous un petit rituel en début d'épisode c'est de poser une question à ceux qui nous écoutent.
Elle est celle-ci : Combien de salariés en situation d'anxiété ou de dépression disent réussir à avoir de bonnes habitudes pour une bonne hygiène de vie et donc, une bonne santé physique ?
La santé mentale des salariés est une question cruciale pour les employeurs, car elles affectent non seulement le bien-être des individus, par escalade le climat travail global et aussi la productivité.
Le rôle de l'employeur dans la promotion et le soutien de la santé mentale des salariés est multiple et peut être décomposée en plusieurs axes clés. Nous allons pouvoir échanger sur plusieurs d'entre eux dans cet épisode, dédié à l'accompagnement de l'employeur pour le bien-être émotionnel de ses salariés.
Pour répondre à la question en introduction, il y a seulement un quart des salariés ayant un bien-être émotionnel altéré, on va dire, qui réussissent à instaurer de bonnes habitudes de vie pour prendre soin de leur santé. On se parle d'hygiène de vie, le sport, le sommeil, la nutrition, les addictions.
Et une précision importante, c'est que 42 % d'entre eux annoncent avoir des comportements addictifs à des substances. On est ici sur le tabac, l'alcool, les autres drogues.
On n'est pas sur les autres addictions comme les paris sportifs ou les problématiques de connexion à des écrans, etc.
Donc Lauriane, je suis ravie de pouvoir discuter avec vous aujourd'hui.
Est-ce que peut-être pour commencer, vous avez envie de rebondir sur les chiffres que je viens d'annoncer ?
[LA] Oui, absolument, je trouve que ce sont des chiffres assez significatifs.
Et ça me conforte dans l'idée qu'on fait bien chez Christian Louboutin d'avoir une politique de prévention des risques psychosociaux. Puisqu’effectivement, il nous semble crucial d'engager nos salariés : ils ne sont pas simplement là pour travailler, ils sont là aussi pour être bien dans leur cadre de travail.
Et c'est pour cette raison qu'on a mis en place une politique de risques psychosociaux qui tiennent compte des trois leviers dont on se parlait : santé physique, santé mentale et santé relationnelle. Sur le sujet de la santé mentale, c'est effectivement une question que je me pose souvent. Jusqu'où est-ce qu'on doit aller en tant qu'employeur ? Quelle est notre responsabilité ? Est-ce qu'on doit accompagner des événements de la vie personnelle qui, on le sait, peuvent avoir un impact sur la vie professionnelle ? On se parlait tout à l'heure de la parentalité.
[GG] Oui, juste avant de commencer notre enregistrement.
[LA] Effectivement, c'est un sujet de la vie personnelle qui a un impact sur la vie professionnelle.
Et on ne peut pas dire qu'il y a une frontière absolument imperméable entre la vie professionnelle et la vie personnelle aujourd'hui.
Et donc, on le sait, c'est une période difficile, le retour : que ce soit congé maternité ou paternité.
Donc effectivement, nous, ce qu'on se dit, c'est qu'on n'a pas à s'immiscer dans la vie personnelle de nos salariés.
Mais peut-être avoir une relation de proximité et de confiance qui permet à un salarié, qui pourrait avoir des difficultés dans sa vie personnelle, de venir les partager avec le manager ou le RH référent, pour pouvoir organiser au mieux cette période.
Puisqu'on le sait, le burn out ou peut-être juste le "craquage" entre guillemets, est peut-être multifactoriel et pas simplement lié au travail
[GG] Oui, effectivement, je pense également qu'il est multifactoriel. Vous parliez de maternité.
Il y a d'autres sujets, effectivement, même dans la parentalité, on a aussi les enfants qui malheureusement peuvent naître ou ça vient après avec un handicap.
On a un gros sujet d'accompagnement là-dessus et donc des risques psychosociaux qui s'ensuivent.
La situation d'aidant, que ce soit pour ses enfants, mais que ce soit pour son conjoint ou les parents.
On a effectivement, tous ce sujet de jusqu'où, en tant qu'employeur, on peut aller aider sur le volet personnel.
C'est pour ça qu'on va voir justement avec les questions que je vais vous poser derrière en quoi tout ce que vous faites peuvent aider aussi dans la dimension personnelle, vos salariés.
Nous avons réalisé une enquête auprès de salariés, on vient d'avoir cette restitution.
Et sur cet aspect justement de santé mentale, ce qu'ils nous disent, c'est qu'ils pensent que la bonne santé physique et donc attractif, c'est le premier levier pour avoir une bonne santé mentale.
Ils ont conscience de cet aspect-là.
Je me demandais donc, vu que c'est pour eux le premier levier, est-ce que vous, vous réalisiez des actions sur ce sujet ?
[LA] Absolument. C'est drôle que vous parliez de ça.
J'ai récemment animé en interne un atelier sur les risques psychosociaux en petits groupes.
Et la gestion du stress, qu'est-ce que vous faites quand vous êtes stressé ?
J'ai la moitié qui m'a répondu, je fais du sport. Et l'autre moitié, je mange du chocolat.
Et dans les deux cas effectivement, il y a un rapport au corps.
Il y a quelque chose qui permet de se reconnecter à son corps pour faire baisser le stress.
Donc, on est convaincu effectivement chez Christian Louboutin de la nécessité de bouger et de se mettre en action pour privilégier donc la santé mentale. Effectivement, on a une vision holistique de la personne.
On n'est pas juste un cerveau. On est un cerveau sur un corps. Et donc effectivement, c'est important pour nous.
Donc on a permis il y a quelques années à nos salariés d'accéder à une plateforme qui donne accès à des salles de sport à des tarifs préférentiels.
Et chacun gère son abonnement.
En interne, on organise assez régulièrement des événements sportifs.
C'est plutôt autour du running, mais voilà, on a fait plusieurs fois les dix kilomètres de Paris.
En octobre dernier, l'Odyssea. Donc des événements comme ça.
Et puis pour la troisième année consécutive là, on est en plein dedans.
On a organisé un challenge de marche. Donc c'est en général au printemps, par équipe, que les salariés composent comme ils le souhaitent. C'est une dizaine de personnes.
Donc ça, c'est assez chouette parce qu'à l'issue, on organise la remise des prix.
Donc ça oblige les gens à marcher et on en voit même qui font leur call en marchant pour faire des pas Et c'est tout l'objet, précisément, quand on est sur des postes de bureau, on ne marche pas.
Donc voilà, on trouve ça assez chouette et puis en plus cette année, on l'a rattachée à une cause puisqu'on marche pour le handicap.
On accumule des points, c'est un challenge, je dirais, orienté un peu diversité, donc c'est chouette.
[GG] Ça crée de la cohésion d'équipe aussi.
[LA] Absolument. Alors, ça crée de la cohésion d'équipe et un peu de compétition entre les équipes, mais c'est marrant quand même parce que c'est bon enfant.
[GG] Très bien. Juste une chose, parce que ça va peut-être intéresser certains parce que notre enquête met en évidence là-dessus. C'est que quand nous rencontrons des difficultés mentales comme quand on commence à être très anxieux ou en dépression, commencer une mini dépression.
On a deux fois et demie plus de chances d'avoir une mauvaise santé physique, parce que justement, on va laisser ce côté-là et donc derrière, créer de gros sujets.
Et peut-être par la suite un arrêt de travail qui pourrait s'ensuivre d'autres complications pour le salarié.
[LA] D'ailleurs, en plus de ces actions, je dirais, on fait aussi de la prévention. Donc on a eu l'occasion de faire intervenir plusieurs fois notre ergonome.
Donc de la médecine du travail sur les conseils pour les salariés de bureau, le travail sur écran, mais aussi le télétravail. Tout le monde n'a pas l'opportunité d'avoir chez soi un vrai bureau, d'avoir des petits conseils.
Et puis on fait aussi intervenir régulièrement une naturopathe pour des conseils à la fois de nutrition, mais plus généralement d'hygiène de vie. En octobre dernier, on a fait sur comment préparer son système immunitaire à l'hiver.
Très prochainement, on a l'intervention d'une sophrologue sur des conseils en lien avec la récupération physique.
Donc la qualité de sommeil, mais pas que, on va aussi avoir un petit atelier sur la sieste, enfin la micro-sieste réparatrice de milieu de journée.
[GG] Ça, j'y crois moi.
[LA] J'y crois et effectivement, quand je peux, j'en fais.
Et puis là, on teste bientôt. On ne l'a encore jamais fait. On a déjà organisé des cours de yoga.
Mais là ce sont plutôt des ateliers en petits groupes avec des coachs sportifs sur respiration, étirements, postures. Ça aussi, on se dit que c'est important pour notamment quand on travaille toute la journée assis.
[GG] Très bien. La prochaine chose que je voulais voir avec vous, c'était l'aspect social.
Et vous l'aviez dit en introduction, parce qu'encore une fois, ce sont les salariés qui ont parlé.
Ils disent que c'est l'aspect social qui est le second levier pour aller bien mentalement.
Donc en premier, la santé physique, en deuxième, ils disaient non, il faut qu'on ait vraiment des interactions sociales et qu'on se sente bien socialement.
Qu'est-ce que vous vous donnez comme importance sur ce point-là ?
[LA] Alors, une très grande importance.
Je ne crois pas vous l'avoir expliqué, mais chez Christian Louboutin, on a quatre valeurs.
La première, c'est la joie, ensuite passion, inspiration et humilité.
Donc ce sont des valeurs qui ont été définies il y a une dizaine d'années par l'équipe RH et qu'on s'efforce d'incarner au quotidien.
D'abord dans notre processus de recrutement parce qu'on n'embauche pas que des gens compétents, on embauche aussi des personnes qui vont rejoindre une équipe, une maison. Donc on s'efforce de recruter des gens qui incarnent ces valeurs.
Ce sont aussi des valeurs qu'on évalue. Puisque dans nos entretiens annuels d'évaluation, il y a une partie sur, est-ce que le salarié incarne ces valeurs.
[GG] Donc un peu sur le savoir être finalement en relation avec la joie.
[LA] Exactement ! Et d'ailleurs, vous voyez, nos locaux incarnent aussi ces valeurs.
On a voulu des locaux joyeux, on est loin de salles de réunion toutes grises.
Et donc dans nos reviews, on a des soft-skills du type esprit d'équipe et de collaboration, attitude positive, constructive. Donc déjà nos quatre piliers sont en lien avec l'importance du relationnel.
On a aussi des formations sur le sujet. On a une formation qui est réalisée en petits groupes et qui plaît beaucoup à nos salariés sur l'assertivité.
Comment je m'exprime. Comment je dis les choses. Comment je sais dire non sans être trop abrupte. Comment j'exprime mes besoins. Donc ça, c'est une formation qui est chouette.
[GG] Cette formation est proposée en facultatif, en obligatoire à vos salariés ou tout le monde doit y passer ?
[LA] Non. Alors, celle-ci, elle est en facultatif en fonction des besoins, je dirai.
[GG] D'accord.
[LA] Sur la population Retail, on avait développé, il y a quelques années, une formation sur la communication saine et sereine et ça, c'était tout le monde.
On est en train de voir ce qu'on va faire sur le siège.
Et puis, on a commencé aussi à parler de communication non-violente. Ce sont des ateliers qu'on va proposer pendant notre semaine de la QVCT, fin juin.
Et puis chez Christian Louboutin, on a aussi un outil qu'on utilise, qui est la médiation.
J'ai été formée, moi, en 2019. Et c'était une idée de notre DRH.
Et c'est vrai que c'est un outil qui est très utile, qui permet de restaurer une relation en cas de tensions, voir de conflits, mais pas seulement, il peut être aussi utilisé et on n'hésite pas à le faire à titre préventif pour créer du lien entre les gens. Et pas du lien comme un team building. Vraiment aider à faciliter la relation.
[GG] Entre parfois le manager de proximité peut-être ?
[LA] Toutes les configurations sont possibles.
Ça peut être manageur, manager, ça peut être toute une nouvelle équipe, ça peut être inter équipe, intra équipe. Donc toutes les configurations sont possibles, je dirais.
Selon le besoin, ce que vous allez ressentir. Ce que l'équipe va pouvoir ressentir.
Et avant que finalement ça prenne une ampleur, directement il va y avoir un atelier.
[GG] Ce ne sera pas une formation peut-être, ça va être une heure ou deux ?
[LA] Bonne question. Parce qu'effectivement, il y a un sujet marketing, sur comment on appelle ça.
Médiation peut effrayer certains salariés.
Le terme en soi, ça donne une idée de conflit ou de, est-ce que c'est quoi, c'est un jugement, c'est un recadrage ? Non, c'est un atelier d'accompagnement et on voit en fonction du besoin comment est-ce qu'on l'intitule. Mais c'est vraiment aider à se connaître.
J'exprime mes besoins. J'écoute ceux des autres. Et je comprends comment je dois fonctionner avec ces personnes.
[GG] Ok. Alors, une fois que finalement, les bases de, on va dire l'intelligence relationnelle sont là, est-ce qu'il y a ce sujet, peut-être, de sentiments d'appartenance ?
On sait, ça revient souvent.
Est-ce que je me sens bien dans mon entreprise ?
Est-ce que je me sens écoutée ?
Est-ce que j'ai bien été intégrée ?
[LA] Effectivement, en plus, chez nous, on est une maison avec un ADN assez fort.
On a la chance, par ailleurs, d'avoir notre fondateur, qui est toujours présent.
Donc, le sentiment d'appartenance est quelque chose sur lequel on travaille.
On a un parcours d'intégration qu'on fait évoluer au cours des années pour le perfectionner, qui est animé en binôme avec un RH et un salarié volontaire. Donc, on trouve ça chouette parce que ce n'est pas que l'affaire de l'équipe RH, d'intégrer les salariés.
Chaque parcours, chaque programme d'intégration est différent puisque animé par des personnes différentes. On a tous un rapport différent à la maison. Ça permet de raconter des anecdotes.
[GG] Il dure combien de temps ce parcours ?
Combien de temps ça dure, le but ? Qu'est-ce qu'ils en disent ?
Est-ce que vous avez un retour positif là-dessus ?
[LA] Alors, c'est deux demi-journées, en tout cas au siège.
Plutôt atelier que trop formation, sur la personne de Christian Louboutin, la marque et le produit parce qu'on a à cœur aussi à ce que nos salariés du siège s'intéressent au produit, pas seulement nos salariés de boutique. Et puis, il y a effectivement aussi des demi-journées en boutique pour permettre à chacun de comprendre le terrain.
[GG] Ok. Très bien.
[LA] On a également un département archives et patrimoine.
Et ça, c'est vraiment génial d'avoir ça parce qu'on a un fondateur qui est très, très créatif qui a donc créé un nombre de paires conséquent. Et aujourd'hui, on commence à l'ouvrir à nos salariés pour comprendre l'historique et les archives de la maison.
[GG] Ça, ça renforce fortement l'engagement.
[LA] L'engagement, absolument.
Et puis, pour les nouveaux entrants aussi, on a un buddy program.
Donc, chacun se voit assigner à un parrain-marraine d'un autre département à peu près de la même séniorité. Mais l'idée, c'est que ce soit quelqu'un qui n'est pas dans votre département et qui explique un peu les us et coutumes de la maison.
[GG] Ma prochaine question, c'était sur la cohésion d'équipe. Mais j'imagine, justement, en faisant ce buddy program, que ça permet de connaître plus de monde et de comprendre un peu ce que font les autres équipes. Mais il y a peut-être d'autres choses sur la cohésion d'équipe que vous faites.
[LA] Alors, par ailleurs, on a à peu près tous les trois mois et en fonction du calendrier, on organise petit déjeuner ou goûter. Donc, ça va être des crêpes, galettes des rois, ce genre d'événements.
On a aussi une soirée annuelle pour vraiment faire en sorte que tout le monde se rencontre, y compris nos personnels des ateliers et boutiques qui ne sont pas forcément à proximité du siège.
C'est important pour nous. Et puis, en termes de cohésion d'équipe, on incite effectivement les directeurs de départements à organiser des séminaires.
[GG] D'accord.
[LA] On peut aider la construction de ces séminaires, nos équipes RH.
On suggère aussi assez souvent qu'il y ait l'intervention de coachs externes.
Ça permet de faciliter le dialogue et aussi de, entre guillemets, sortir les salariés, de ne pas faire ça dans nos locaux.
[GG] Donc, ça, ça serait de fréquences annuelles, les séminaires ?
[LA] Idéalement. Après, c'est effectivement en fonction du directeur de département.
[GG] Et est-ce que vous faites des mini-rencontres, des mini-meetings où les gens peuvent se parler juste 5-10 minutes entre différentes équipes ? Est-ce qu'il y a des choses ainsi ?
[LA] Alors, on avait lancé cette initiative pendant le Covid, parce que ça a été quand même une période longue.
On avait inventé ce qu'on a appelé le Louby Life. C'était je raconte ma vie chez Christian Louboutin.
Et donc, ça, c'était chouette. On faisait ça en visio. Et puis, comme ça a bien pris, on a fait ça ensuite en physique. Et c'était un café pendant lequel chacun avait 10-15 minutes pour raconter ce qu'il faisait.
Et effectivement, c'était génial car les gens souvent se fréquentent sans vraiment savoir exactement ce que fait l'autre. On n'a pas réitéré cette initiative, mais maintenant que vous m'y faites penser, je pense que ça pourrait être chouette.
En tout cas, on a un parcours managérial qui incite les salariés managers à discuter entre eux.
Mais je vous en parlerai un peu plus tard.
[GG] On se reparlera de ça. Le dernier aspect peut-être sur le levier social, sauf si vous en avez d'autres.
Je me demandais, c'est peut-être ce que vous faites en termes d'inclusion, d'équité, diversité.
Comment est-ce qu'on peut être soi-même et se sentir bien au sein de Louboutin ?
[LA] Effectivement, on a créé il y a quelques années un comité D.E.I. qui est international.
Et donc, ce comité organise des moments pour sensibiliser à tel ou tel sujet.
Par exemple, ils ont fait Octobre Rose la dernière fois pour sensibiliser au sujet du cancer du sein.
La directrice D.E.I. organise aussi chez nous des formations sur les biais cognitifs qui est bien appréciée par nos salariés.
On l'oriente essentiellement sur le recrutement, mais pas que, en réalité, puisque c'est au quotidien également, c'est un sujet que nous avons à cœur de traiter.
Notamment, on a des référents handicap. On organise des DuoDay.
[GG] Duoday pour que les gens, peut-être que tout le monde ne connaît pas.
[LA] C'est offrir l'opportunité à des salariés handicapés de venir découvrir un métier au sein de la maison.
C'est chouette et c'est fait effectivement en binôme avec un manager.
[GG] Très bien. Ça, c’étaient mes questions sur tout l'aspect social. Arrivent ensuite d'autres sujets.
Tout aussi importants, même s'ils ne sont pas relevés forcément par les salariés dans notre enquête.
Finalement, c'est comment les aider au repos émotionnel. Vous aviez déjà parlé de gestion des émotions.
Mais en fait, peut-être dans un aspect plus classique où peut-être les employeurs vont plus sur ces aspects-là en première instance pour pouvoir aider leurs collaborateurs sur la santé mentale.
C'est un petit peu comme on fait pour le sujet du stress, de l'anxiété due à la charge de travail, à l'équilibre vie pro, vie perso.
Et là, en fait, est-ce que vous êtes bienveillant en tout cas sur l'aspect charge, sur la charge que vont avoir les salariés ? Mais peut-être côté manager car il y a peut-être un vrai sujet aussi côté manager.
[LA] Oui, absolument. Effectivement, c'est un sujet dont on se préoccupe.
On a déjà organisé avec un psychologue du travail des ateliers sur la gestion du stress et des priorités.
Organiser sa journée de travail, ça paraît simple mais en réalité, c'est important de rappeler aux salariés qu'ils ont le droit de se ménager du temps, de refuser des réunions qui pourraient, comme ça, sauter dans leurs agendas entre 13h et 14h.
On a aussi dispensé en interne à la rentrée et on aimerait le faire à chaque rentrée un peu les bonnes pratiques sur la gestion des emails, la gestion des réunions.
Je m'efforce par exemple de prévenir un salarié avant de lui adresser une réunion. Je lui demande ses dispos dans la réunion. J'essaie de mettre un titre clair pour que la personne comprenne si c'est à titre d'information ou si sa présence est vraiment indispensable.
Toutes ces choses-là qui permettent au quotidien, qui permettent d'avoir un quotidien facile et plus fluide finalement. Donc oui, ce sont des choses dont on se préoccupe.
Sur l'équilibre vie professionnelle, vie personnelle, on a une politique de télétravail qu'on trouve plutôt intéressante. J'ai entendu dire que plusieurs entreprises étaient de nouveau restrictives sur le télétravail.
[GG] Oui, tout à fait.
[LA] Surtout dans les maisons de mode.
Et nous, on se dit que c'est important de garder ces deux jours optionnels puisque tout le monde n'a pas envie de télétravail.
Et puis on offre la possibilité de faire une semaine deux fois dans l'année 100% télétravail qu'on peut éventuellement coller à des congés. Ce qui permet de prendre plus de temps sur son lieu de vacances.
Ce sont des petites choses. On a aussi une politique pour la parentalité.
[GG] Ce sont des petites choses mais en fait mis bout à bout effectivement dans une politique davantage sociale et de se dire sur la qualité de vie au travail. Ça prend vraiment un sens et nous, on voit que c'est important pour les salariés dans ce qu'ils nous disent et sur la flexibilité du travail.
Les chiffres parlent sur les jours d'absentéisme qui sont vraiment à la baisse depuis qu'il y a de la flexibilité pour certains en fait.
[LA] Et puis là, pendant notre semaine QVCT, on va tenter une nouveauté.
On va faire des ateliers avec une psychologue clinicienne plutôt pour aider les salariés à réfléchir à où j'en suis, comment je vais vis-à-vis du travail. Que ça ne tourne pas à la thérapie de groupe.
Ce n'est vraiment pas l'objet mais c'est plutôt est-ce que le matin.
[GG] En collectif donc ?
[LA] Oui.
[LA] En collectif mais petit groupe, une dizaine de personnes sur non pas la gestion des émotions mais plutôt l'appréhension. Où est-ce que j'en suis ? Comment je vais ? Quand je viens au travail le matin, quand je pars le soir, …
[GG] Est-ce que vous mesurez l'impact de toutes actions ? Est- ce que vous allez recenser le retour des salariés ? Est-ce que d'eux-mêmes ils en parlent et ils disent qu'ils sont ravis de ça ?
Est-ce que vraiment vous voyez peut-être même un avant un après sur certaines situations ?
Peut-être sur la médiation comme vous disiez ?
[LA] En début d'année dernière on avait créé un focus groupe QVCT pour avoir un feedback de nos salariés sur ce qu'on avait déjà mis en place et sur ce qu'on pouvait faire.
On n'a à ce jour pas vraiment fait de sondage post action mais plutôt en amont.
En 2021 justement à la sortie du Covid, on avait interrogé un panel de salariés sur, c'est quoi pour vous la qualité de vie au travail ? Pour quelles raisons vous êtes venue chez Christian Louboutin ?
Pour quelles raisons vous restez ? Et ça nous avait permis de voir que le sujet relationnel était clé.
Il y en avait d'autres le développement de carrière et ce genre de choses mais la raison pour laquelle les salariés sont bien chez nous c'est cet aspect relationnel, donc on était assez content.
On en parlait encore récemment notre meilleur indicateur c'est les salariés qui reviennent.
Ce qu'on appelle les retours en boomerang. Ils font d'autres maisons et un beau jour ils voient un poste chez nous et puis ils nous appellent et on en a plusieurs et plusieurs fois par an.
Alors parfois le processus ne va pas jusqu'au bout mais c'est quand même un signe qu’il doit y avoir quelque chose chez nous de bien.
[GG] On s'y plaît.
[LA] Oui c'est ça c'est assez flatteur.
[GG] Peut-être juste une dernière question c'est comment éviter les situations de non-retour ?
Aujourd'hui est-ce que vous avez mis en place des outils ? Que faites-vous pour réussir peut-être à détecter les gens qui sont en situation d'hyper-anxiété ou qui sont en mini-dépression ou qui ont des difficultés peut être minimes mais avant qu'elles prennent une importance forte chez eux, est-ce que vous avez mis en place des outils ?
[LA] Écoutez, vous avez utilisé le mot détecter, pour moi c'est ce qui est important la prévention c'est bien mais détecter c'est mieux, et on a donc un management de proximité une équipe RH aussi de proximité qui est régulièrement formée à ces sujets et nos managers qui donc on s'en parlait on est en train de créer un parcours managérial qui existait déjà mais qu'on souhaite affiner et on à bientôt donc c'est une nouveauté aussi on organise un atelier avec un cabinet enfin une agence de philosophie, une agence de philosophie. Oui alors la philo en entreprise ce n’est pas banal mais le cabinet auquel on fait appel existe depuis 12 ans donc c'est que ça a dû fonctionner, ça a fait ses preuves en tout cas avant on se demandait c'est quoi un bon manager ? En fait c'est quoi être manager ?
Et c'est sur ce thème qu'on va réfléchir et surtout c'est quoi être manager chez Christian Louboutin ?
Et ça voilà c'est une démarche à laquelle on associe nos salariés et on voudrait définir peut-être 3 ou 4 piliers c'est quoi être un manager chez nous ? Cela consiste en quoi ?
Et donc voilà ça c'est important pour nous de créer une communauté managériale de proximité on a également des référents harcèlement qui sont formés aussi bien d'un point de vue juridique que posture je dirais et ils jouent un rôle clé on s'en est déjà aperçu par le passé car bon alors référent harcèlement c'est un mot qui fait peur harcèlement mais en réalité ce sont plus des référents je dirais, au global QVCT qui nous font remonter des choses.
Pour moi c'est un acteur clé parce qu’il est plus neutre et c'est peut-être plus facile pour un salarié de passer par un référent que de venir s'exprimer pour soi en direct et les nôtres sont actifs. Donc je trouve que c'est un acteur qui est important et à titre personnel j'ai souvent recours avec notre médecin du travail parce que parfois, quand c'est notre limite moi je ne suis pas médecin, je peux remarquer des choses mais je trouve que c'est important d'avoir l'avis d'un professionnel sur la question et on a alors il y a les entretiens obligatoires très bien enfin les rendez-vous médicaux obligatoires mais très souvent, je la sollicite car j'ai des doutes et que je préfère avoir son avis.
[GG] Et la phase d'après c'est quoi ?
[LA] Sous couvert du secret médical évidemment s'il y a besoin d'actions elle me fait signe, le salarié est informé bien évidemment je n'ai jamais de détails sur l'entretien qu'ils ont eu mais ça pourrait être besoin d'un jour de télétravail en plus ou salarié qui a besoin de prendre du repos aménagement de poste aussi car ça pourrait être quelque chose de physique. Le salarié n'a pas à nous faire part de ses difficultés mais en tout cas ça permet effectivement aussi de prendre des mesures pour s'adapter.
[GG] Ok, cellules psychologiques, du soutien psychologique que vous proposez à vos salariés au cas où ils auraient besoin de...
[LA] Alors c'est plutôt ad hoc, c'est-à-dire qu'on l'a mis en place pendant le Covid, on a pu aussi le mettre en place au sein d'une équipe où il y avait eu un décès d'un jeune salarié qui avait affecté l'équipe.
On n'a pas, à l'année je dirais, de cellules psychologiques, mais au sein de notre médecine du travail il y a effectivement un service psy en lien avec le travail et donc si on a besoin on peut effectivement les solliciter.
[GG] Ok. Une chose parce que je me demande si nos auditeurs se posent cette question-là, parce qu'il y a beaucoup d'actions mises en place, c'est comment est-ce que vous organisez finalement un planning pour les salariés, pour les managers au niveau de la QVCT ? Enfin comment est-ce que vous en faites un planning cohérent dans l'année ?
[LA] Ecoutez, très bonne question. On s'est souvent posé la question au sein de l'équipe RH de formaliser ou pas les choses, et on reste sur ou pas, parce qu'en fait on ne veut pas que ce soit figé.
Donc il n'y a pas une régularité précise, c'est en fonction des besoins. On sent les choses je dirais, donc, il y a des choses qui collent au calendrier, vous voyez, préparer son système immunitaire à l'hiver, aucun sens de le faire au mois de mai, mais je dirais que les choses sont faites de manière assez fluide et on est content de ne pas avoir à se poser la question justement d'un calendrier.
Donc cette année on refait la semaine du bien-être, on ne l'avait pas faite depuis un moment, puisque la dernière fois on l'a fait en digital, en post-covid, ce n'était pas terrible.
Donc il y a ce temps fort je dirais, mais on a à cœur que les choses soient faites comme elles viennent et quand on ressent le besoin je dirais.
Typiquement on n'a jamais eu envie de rédiger un accord QVCT, on trouve que la QVCT ça ne doit pas être écrit, ça doit être vécu, ça doit être des actions.
Donc voilà, on fait les choses en fonction des rencontres aussi, vous voyez, je vous parlais des ateliers philo, c'est aussi ce que j'aime chez nous et ce qui plaît aussi à nos salariés, cette flexibilité et cette adaptabilité à ce qui se passe.
[GG] J'entends que finalement ce n'est pas forcément obligatoire aussi, ce sont des ateliers qui sont, si vous avez envie de venir, si vous vous sentez concerné, venez à notre atelier, venez à cette formation.
[LA] Absolument, c'est un peu ce que je vous disais en introduction, c'est responsabiliser nos salariés, en réalité chacun participe à la QVCT et à ce sujet de la santé mentale comme il l'entend.
Ce qui est obligatoire ça va être plutôt les formations managériales sur le sujet des RPS, tout ce qui va être harcèlement, gestion du stress.
Après le reste c'est du plus je dirais, c'est effectivement en fonction des besoins et des envies de chacun.
[GG] On arrive à la fin de notre entretien, en tout cas de ce que moi je peux remarquer, c'est que parfois les employeurs et voulant bien faire, la première chose qu'ils se disent pour aider les salariés sur la santé mentale c'est on va mettre en place un soutien psy et pas forcément réfléchir comment je vais penser en 360° pour aller accompagner le salarié, pour qu'il se sente bien et dans l'entreprise et en même temps lui donner des tips pour qu'il se sente bien, pour qu'il puisse s'en resservir chez lui.
Parce que quand on fait des formations, des ateliers sur la gestion des émotions, comment gérer le stress, l'équilibre etc, ce sont des choses qui peuvent servir aussi dans le perso.
Et donc finalement il n'y a pas effectivement qu'une ligne, même si je ne vais pas dire que c'est pas utile, c'est utile, il faut communiquer dessus.
Et d'ailleurs parfois beaucoup en ont mis une en place, une ligne d'écoute psychologique, mais on ne communique pas assez et donc il faut peut-être faire un point là-dessus.
Ce qu'on sait de toute façon, c'est qu'un salarié qui est épuisé mentalement, qui ne va pas bien, est deux fois moins engagé et il a presque trois fois plus de chances d'être absent et de poser donc du coup, de se mettre en arrêt de travail.
Est-ce qu'il arrive encore de souvent voir des personnes qui montrent des signaux de difficultés ?
[LA] Ça peut arriver, le risque zéro n'est pas possible, mais rapport au nombre de salariés que nous avons au sein de la maison, effectivement je trouve qu'il y a un climat social et une santé sociale plutôt très bien chez nous.
[GG] Alors il y a d'autres sujets, juste pour conclure, qu'on aurait pu aborder.
En introduction on l'a dit, la parentalité, peut-être le sujet des aidants, on n'a pas parlé des difficultés financières qui peuvent amener aussi des sujets des difficultés sur ces aspects-là, donc on pourrait encore s'en parler, mais on va aussi s'arrêter dans notre épisode, peut-être qu'on pourra revenir là-dessus.
Moi si j'avais à dire une dernière chose avant de vous laisser conclure Lauriane, c'est que quand même se dire que 80% des difficultés psychologiques sont du ressort souvent de l'accompagnement social et économique.
Et donc effectivement sur tout l'aspect social, et là on en a parlé longuement, tout l'aspect économique on pourrait en parler aussi, mais ça fera peut-être l'objet d'un autre épisode.
Il me semblait quand même important de le dire dans l'accompagnement aussi qu'on peut avoir auprès de ses salariés.
Et puis je vous laisse la conclusion Lauriane.
[LA] Merci beaucoup Géraldine. Effectivement, le sujet de la santé financière est un sujet dont on aimerait s'occuper prochainement. On s'est d'abord effectivement plutôt interrogé sur l'aspect social.
On a une population de salariés plutôt jeunes et on a effectivement, on se disait que peut-être les sensibiliser à des sujets économiques, l'inflation, tout le monde en parle, personne ne sait vraiment ce que c'est. Comment je gère un budget ? Ça pourrait être l'objet d'une prochaine réflexion.
Et puis on s'était aussi parlé des addictions. Pour l'instant, on n'a pas d'action en interne sur ce sujet, mais pourquoi pas. Et je trouve que l'addiction qui pourrait être traitée en premier, effectivement pourrait être l'addiction aux écrans. On avait déjà imaginé faire une semaine de digital détox.
Ça pourrait faire partie aussi des prochains chantiers au sein de la maison.
[GG] Merci Lauriane.
[LA] Merci Géraldine.
[GG] Merci à vous.
[JD] Merci pour votre écoute.
Nous espérons que cet épisode vous aura inspiré.
Ensemble, continuons d'en parler pour cultiver le bien-être et la prévention.
Nous vous donnons rendez-vous très vite pour un prochain épisode.
D'ici là, n'hésitez pas à vous rendre sur notre site internet www.wtwco.com.
Nous serons ravis de vous accompagner.