Saison 1 – Episode 5
30 Octobre 2024
Dans un environnement professionnel où l’attraction et la rétention des talents sont les maîtres mots, construire et développer une politique Bien-Etre semble incontournable. Que vous soyez DRH, manager, salarié, dirigeant d’entreprise ou encore partenaire social nous avons conçu ce podcast pour vous offrir des perspectives inspirantes, des conseils pratiques et des histoires captivantes.
Pour cet épisode, notre responsable Prévention et Bien Être chez WTW, Géraldine Guimaraes accueille Caroline Bettini, Directrice des Ressources Humaines du Groupe Coopératif Vivadour.
Ensemble, elles discutent de la vision du bien-être en entreprise et des leviers majeurs qui peuvent être activés pour améliorer la qualité de vie au travail.
Bonne écoute !
Attraction et rétention des talents.
Engagement au travail, productivité et efficacité des salariés.
Bien-être des salariés.
Le bien-être, c'est vague.
De quoi parle-t-on ?
Émotionnel, social, physique, financier pardi.
[CAROLINE BETTINI] Il y a aussi un devoir, une obligation que les entreprises RH, les membres RSE, etc, doivent faire. C'est tout ce qu'on appelle du benchmark. Regarder ce qui se passe ailleurs, à côté, ou dans d'autres pays, où il y a souvent de très très bonnes idées qui peuvent être mises en place sans réinventer la poudre.
[JUSTINE DALMAS] Bienvenue sur le podcast Cultivons le Bien-être et la Prévention de WTW.
Le podcast dédié à l'accompagnement santé, bien-être, prévention et équité.
Dans un environnement professionnel où l'attraction et la rétention des talents sont les maîtres mots, construire et développer une politique bien-être semble incontournable.
Que vous soyez DRH, manager, salarié, dirigeant d'entreprise ou encore partenaire social, nous avons conçu ce podcast pour vous offrir des perspectives inspirantes, des conseils pratiques et des histoires captivantes.
Tout au long de cette série, notre experte sur le sujet chez WTW, Géraldine Guimaraes, sera accompagnée d'invités exclusifs sur les thématiques précises du bien-être et de la qualité de vie au travail.
[GERALDINE GUIMARAES] Bonjour Caroline Bettini.
[CB] Bonjour Géraldine.
[GG] Vous êtes DRH chez Vivadour depuis trois ans, un mot sur Vivadour et vos responsabilités ?
[CB] Alors, Vivadour est une coopérative agricole. Qui dit coopérative, elle englobe en fait principalement tout ce qui est monde agricole avec six filières d'activités. Donc c'est assez vaste.
Nous touchons une large population d'agriculteurs et d'adhérents.
[GG] Et quelle est ma fonction chez Vivadour ? En tant que DRH groupe je m'occupe entre autres du recrutement jusqu'à la sortie des collaborateurs, tout en passant par la paie, tout en passant par la formation avec une équipe dédiée.
[GG] Alors pour information, je commence toujours nos épisodes avec une petite question pour les auditeurs, suivie d'une introduction que je lis, donc j'ai envie de dire place à la lecture, ça sera bref.
[CB] Très bien.
[GG] Quel est l'objectif principal d'un employeur à vouloir mettre en place une stratégie de bien-être global au sein de son organisation ? Une entreprise qui investit dans le bien-être de ses employés, c'est en tout cas ce que nous pensons chez WTW et vous pourrez nous donner votre avis Caroline, bénéficie d'une meilleure productivité, d'une diminution de l'absentéisme et d'une amélioration de l'attraction et de la rétention des talents. D'ailleurs, en parlant d'attraction et rétention des talents, 81% des employeurs nous indiquent mettre en place une politique de bien-être dans ce but précis.
Alors, c'est un processus ambitieux qui peut rencontrer plusieurs limites, qui freine son succès, nous avons la chance de pouvoir donc en parler avec vous Caroline Bettini.
[CB] Très bien. Je vais partager avec vous.
[GG] Peut-être pour commencer, ma première question serait, pour vous, qu'est-ce que le bien-être ?
[CB] Alors, si on doit prendre une définition générique du dictionnaire, c'est une situation où on est bien dans sa peau en fait, une sensation agréable. Mais après, ma définition à moi est beaucoup plus, et là on rentre peut-être dans des domaines un peu philosophiques, il y a le bien-être physique et le bien-être psychologique, les deux sont intimement liés, si on n'est pas bien dans sa tête, physiquement, ça va se ressentir, si on n'est pas bien dans sa peau physiquement, ça va jouer sur le moral.
Tout ça est lié à des facteurs très personnels, des facteurs de profil également, et quel est notre seuil d'acceptation dans certaines situations, et comment on va gérer notre bien-être ?
Et notre bien-être va être réglé, par exemple on rentre chez soi, on va faire un environnement très agréable, avec des couleurs très agréables, etc. Donc on va jouer sur son bien-être quand on rentre chez soi. On va également faire de l'activité physique, il y en a qui vont courir, mais il y en a qui vont faire quelque chose de plus soft, tel que le yoga, la méditation.
Il y a l'alimentation, il y a beaucoup de choses dans le bien-être, et je dirais que ça va même plus loin, c'est également dans son travail, dans son quotidien.
Mais on peut dans son environnement, faire également de son environnement de travail, faire quelque chose pour être bien à la place où nous sommes.
Et puis après on va plus loin, c'est-à-dire la pression hiérarchique, la pression des résultats, la charge de travail, tout ça, c'est aussi des seuils d'acceptation de chaque individu.
Donc le bien-être, c'est large pour nous.
C'est très large.
[GG] Avec ce que vous me dites, j'ai deux choses : un commentaire et une question.
Premier commentaire, vous me parlez de philosophie, c'est quelque chose qui me passionne, mais je n'irai pas jusqu'à là, mais un peu quand même.
Il y a un vrai sujet aujourd'hui, enfin, en tout cas quand on creuse avec les philosophes, sur la différence entre le bien-être, entre être en joie, entre se sentir heureux, et en fait tout ça est à distinguer, ce n'est pas la même chose qu'on cherche.
Et aujourd'hui on se perd un peu à la quête d'un bonheur, mais qu'est-ce que le bonheur ?
On pourrait faire tout un sujet de philosophie, mais tout ça en fait, finalement est très différent.
Il faut se dire, ok, mais qu'est-ce qui est ma priorité ?
Qu'est-ce qui est le plus important pour moi ?
[CB] C'est ça, mais c'est ce que je vous disais, ça revient à son facteur personnel, son vécu, son facteur, son seuil d'acceptation.
Ça revient à tout ça.
Moi, je vais avoir un besoin de silence intense alors que d'autres ont besoin d'écouter de la musique.
Au bout d'un moment, la musique va me taper sur les nerfs. C'est un exemple.
[GG] Par rapport à ça, ma question suivante, c'est jusqu'où pensez-vous qu'un employeur doit aller pour l'accompagner dans son bien-être ? Parce que vous parliez juste avant que cela va aussi dépendre de son vécu. Donc oui, il y a des causes qui sont internes à l'entreprise, externes à l'entreprise, qui sont internes à la personne. Est-ce que vous avez une vision, des convictions sur ce sujet ?
Jusqu'où doit aller un employeur ?
[CB] Alors, l'employeur a une obligation. Alors là, je vais me mettre du côté de la loi.
Il a une obligation de sécurité, notamment on intègre maintenant dans la sécurité le bien-être au travail.
Faire attention à la surcharge, faire attention à la pression, etc., ou à l'environnement de travail, des lieux où c'est humide, où il fait trop froid. On va rentrer dans ce genre de choses.
Et d'un autre côté, il y a aussi, même si c'est un devoir de l'employeur, quelque part, il a un devoir limité.
Il y a aussi un devoir du collaborateur de faire aussi attention à ce qu'il peut accepter par rapport à son vécu. Il y a des gens qui arrivent dans une entreprise, on ne sait pas leur historique, ils ont eu un burn-out.
[GG] Et on n'est pas au courant.
[CB] Et on n'est pas au courant. Nous on part de zéro, on ne sait pas.
Quel est son seuil d'acceptation par rapport à une pression hiérarchique, par rapport à une pression des résultats ? On ne le sait pas.
Là, il y a quand même une chose importante, c'est le moment du recrutement.
Quand on rencontre son manager, il faut lui poser toutes les questions nécessaires, voir le feeling qu'on a avec et qu'est-ce qu'on accepterait de cette personne.
[GG] Donc la politique finalement de bien-être dans une entreprise, c'est finalement deux acteurs qui le font. Et donc ça commence dès le recrutement, d'après vous, car j'allais vous demander ce qu’est la politique de bien-être en entreprise pour vous. Le début de réponse en tout cas, et je vous laisse la parole, ça commence dès le recrutement et c'est aux deux parties de l'initier.
[CB] Oui, tout à fait. En recrutement, vous rencontrez président, manager, etc.
Généralement, de plus en plus maintenant, les nouvelles générations regardent également les valeurs d'une entreprise. Google nous aide, les sites des entreprises nous aident.
On peut identifier l'ADN de l'entreprise et les valeurs de l'entreprise. Est-ce que je rentre dans ces valeurs-là ?
Est-ce que ça correspond aux miennes ? Déjà, première étape.
Bon, ok, cette entreprise m'intéresse, elle correspond à mes valeurs, mais maintenant qui est-ce que je vais avoir comme manager ? Il est évident qu'au cours de ma carrière dans l'entreprise, je vais peut-être changer de manager. Mais le premier manager, celui qui m'ouvre la porte, est-ce que je vais m'entendre avec lui ? Est-ce qu'il correspond au type de management que je veux ?
Donc ça, c'est important.
[GG] On vient sur le sujet de la connaissance de soi. Est-ce que je me connais ? Je sais ce dont j'ai besoin ?
[CB] Généralement, on se connaît. Même un jeune qui sort de l'école, il se connaît, il sait.
De plus en plus, je trouve que la jeune génération, elle est très engagée. Très engagée sur tout ce qui est écologie, etc. Donc, ils savent déjà. Ils sont très avancés sur cela. La scolarité aide également.
On a un type de professeur qu'on apprécie. On a un autre type de professeur qu'on n'apprécie pas.
Donc, déjà, on l'identifie. Puis après, on a son parcours personnel.
Mes parents, on a travaillé, on a fait des stages, on a déjà identifié des choses.
Donc, il ne faut pas sous-estimer le fait qu'on ne se connaisse pas.
On se connaît. Maintenant, la question est, je vais aller plus loin.
Ai-je suffisamment, et c'est généralement le bas qui blesse actuellement, j'ai besoin de travailler.
Oui. Est-ce que j'ai le choix ?
[GG] Je suis obligée de travailler et je n'ai pas le choix.
Et de l'autre côté, je suis obligée de recruter, je n'ai pas le choix non plus.
Est-ce qu'aujourd'hui dans les processus RH, c'est justement ce que vous dites, vous l'initiez dans les valeurs de notre entreprise ? Elles sont telles qu'elles sont.
On aurait besoin de tel profil, en tout cas sur les compétences, les soft skills, comme on dit, les compétences douces, comportementales. Est-ce que ça, vous l'initiez dans vos process RH ?
[CB] Oui. Déjà, mon équipe RH, sait pertinemment en recrutement, sur quoi ils doivent travailler.
Parce que la technicité, il faut la laisser au manager et au recruteur qui va embaucher.
Par contre le RH, lui, va avoir une vision beaucoup plus large, à savoir, quel profil il a en face de lui.
Et si ce collaborateur quitte ce service, est-ce qu'il est en mesure d'intégrer un autre service avec un autre type de management ? Donc ça, le RH va pouvoir l'identifier dans son profil.
Et après, nous avons des fiches de fonction et je suis en train de revoir au fur et à mesure toutes les fiches de fonction. Et à chaque fois qu'on a un recrutement, on revoit les fiches de fonction.
Je rajoute un maximum de soft skills parce que pour moi, ce n'est pas la fiche du poste du collaborateur, c'est la fiche du poste, du métier, du poste en lui-même. On se trompe et on s'est trompé pendant très longtemps en recrutement et en ressources humaines en disant, voilà, moi le collaborateur que j'ai, il fait ça, il fait ça, il fait ça et il est comme ça. Ce n'est peut-être pas le collaborateur que tu veux avoir en fait.
On l'a sur place, mais quel est le monde idéal ?
Quel type de soft skills on a besoin ?
[GG] Alors, deux éléments, peut-être un rappel : les soft skills, car peut-être que tout le monde ne le sait pas, ce sont les compétences douces, les compétences comportementales.
Et donc en fait, c'est tout le savoir-être. C'est l'écoute, l'empathie, le relationnel, l'intelligence émotionnelle, la curiosité, le droit à l'erreur. Ce sont toutes ces choses-là, la médiation, c'est tout un tas de compétences comportementales. Et donc, si on se disait que, à la question pour vous, qu'est-ce qu'une politique de bien-être ?
Un, vous avez parlé du recrutement. Deux, finalement, les soft skills font partie d'un poste et ne font pas forcément partie, enfin, font aussi partie d'un collaborateur ou d'un futur collaborateur.
Mais en tout cas, il faut penser fiche métier, métier. Et donc, pour ce métier-là, pour être RH, il faut telle compétence.
[CB] Absolument.
[GG] Pour pouvoir être leader, il faut avoir telle compétence.
Pour pouvoir être assistante commerciale, il faut une autre compétence, enfin, d'autres compétences comportementales de soft skills.
[CB] Absolument. Après, et c'est toute l'ambiguïté de l'homme, en fait.
Après, on va faire son propre poste. Par exemple, je ne suis pas une RH identique à une autre RH, ou à un autre RH. On a nos personnalités et on va jouer sur nos, je dirais, nos soft skills pour servir de levier.
Mais le DRH qui sera à côté de moi et qui est complètement différent, aura d'autres soft skills.
Qu'est-ce que l'entreprise peut aussi ?
[GG] Et je remets juste le lien parce que toute la cohérence, peut-être certaines personnes se posent la question, la cohérence avec la politique de bien-être, c'est que si on a justement les soft skills d'un poste et qu'on fait ce poste-là, on se sentira d'autant plus épanoui. C'est-à-dire qu'en fait, un rond rentre dans un rond et ne rentre pas dans un carré. Et donc, on ne peut pas peut-être être acheteur si on n'a pas la compétence, certaines compétences en disant, je vais devoir me confronter relationnellement, savoir gérer mes émotions.
Si je ne sais pas faire ça, je vais peut-être avoir du mal à me sentir épanoui dans mon rôle d'acheteur.
Je prends acheteur, j'aurais pu prendre d'autres exemples.
Ou commercial.
[CB] Oui, oui, tout à fait. On sait bien que les profils d'un acheteur et d'un commercial sont différents.
La négociation, l'approche de négociation est complètement différente. Donc, oui, c'est complètement ça.
[GG] Est-ce que vous voyez une différence entre quand on est dans une entreprise de culture française et une entreprise de culture anglo-saxonne ?
[CB] Oui, complètement. En France, je trouve qu'il y a beaucoup de tabous.
Il y a des tabous sur les rémunérations, il y a des tabous sur certaines valeurs. On met par exemple un code d'éthique.
Là, il y a à la limite, du fait de notre histoire en France, il y a cette notion de délation par exemple quand on veut mettre un code d'éthique. Aux États-Unis, ils s'en fichent royalement.
Et également, en termes de management, c'est complètement différent. Aux États-Unis ou même en Angleterre, vous avez suffisamment de transparence avec votre manager pour pouvoir lui dire les choses sans qu'il le prenne comme une attaque personnelle.
Cependant, avec un manager français, c'est plus compliqué. Plus compliqué parce qu'on a l'impression qu'il se sent... Alors, je ne vais pas faire quelque chose de général, mais c'est en majeure partie le propre de ce que j'ai rencontré dans des entreprises françaises. Ils se sentent attaqués personnellement alors que ce n'est pas le cas. Vous voyez ce que je veux dire ?
[GG] Oui, je vois bien. Mais je vois aussi par rapport à ce que vous nous dites que le rôle du manager a l'air d'être central. Alors, j'avais prévu d'en parler, mais je pense qu'on va en parler tout de suite.
Mais pour vous, je pense que dans les limites, les prérequis avant d'installer une stratégie de bien-être, ou en tout cas en l'installant, on aura beau mettre tous les budgets et faire toutes les actions.
Je pense ne pas me tromper en disant qu'il y a un vrai sujet manager.
[CB] Absolument.
[GG] Et sans taper sur le manager. Ce n'est pas du tout critique, comme vous venez de le dire d'ailleurs.
[CB] En aucune façon. C'est une rencontre de deux personnes, le manager et son collaborateur.
Mais le manager joue un rôle d'avoir une attention particulière vis-à-vis de son collaborateur et de s'adapter aussi à son collaborateur. Là, on peut rentrer un peu plus en détail.
En France, on a l'habitude de nommer des managers, car c'était des experts.
[GG] Oui.
[CB] Il était expert dans la chose.
[GG] Très bien.
[CB] Mais est-ce qu'il est pour autant capable de manager, pour autant capable de transmettre, pour autant capable d'écouter, pour autant capable de déléguer ? Alors, il y a deux approches.
Il y a ceux qui sont demandeurs et fort heureusement, il y en a de plus en plus.
Mais il faut le dire, il faut le dire aux auditeurs également, ils le reconnaîtront.
J'ai eu des managers qui me disent, mais moi, pourquoi tu veux m'envoyer en formation ?
Je n'ai pas besoin. J'ai prouvé, je suis manager.
[GG] Le déni.
[CB] Oui.
[GG] Et est-ce que là, on en vient à ce que l'organisation, dans une vue plus globale, peut aller aider à décanter la situation ?
[CB]Ou on passe par un supérieur hiérarchique qui a déjà entendu qu'effectivement, il y a une problématique sous ce manager au niveau des équipes. Il y a un genre de stress, un genre de mal-être, etc. Et donc là, c'est peut-être le pouvoir hiérarchique au-dessus de ce manager qui va dire, attends, ça serait bien quand même que tu suives cette formation. Ça va t'aider à voir autre chose à l'extérieur, rencontrer également d'autres personnes. Parce qu'il y a aussi, quand on part en formation, on rencontre d'autres managers et on partage aussi des choses. On se remet en question, on apprend certaines choses. Donc là, il y a la notion du hiérarchique qui va intervenir. Mais c'est toujours très compliqué parce que forcer quelqu'un à faire ce qu'il n'a pas envie de faire, cela ne sert à rien. Vous parliez tout à l'heure de mettre des carrés d'environ, cela ne va pas aider.
[GG] Après, pour préciser quand même, pour qu’il n’y ait pas d'amalgame, vraiment le sujet du manager qu'on est en train de se dire, c'est qu'on a bien compris qu'il jouait un rôle crucial, parce que je vous suis sur ce que vous êtes en train de dire.
[CB] Central.
[GG] Alors central, il joue un rôle central parce qu'il a effectivement la pression de la direction pour lui et ses objectifs. Il a son travail en lui-même à gérer, dans le temps imparti, pour lui aussi continuer d'aller bien mentalement, d'aller bien physiquement, d'avoir sa vie sociale, sa vie pro, vie perso.
Et à côté, il doit savoir manager, il doit amener, il doit permettre de donner des perspectives à ses collaborateurs, les gens qui sont dans son équipe. Et il doit pouvoir détecter les vulnérabilités justement, s'il y a des risques sur la santé mentale, sur l'épuisement professionnel, sur tout type, même la santé physique, que ce soit maladie professionnelle ou non, de pouvoir être là et alerter.
Et si on revient sur la stratégie bien-être, il doit être aussi en connaissance de tout ce que fait l'entreprise, justement pour actionner les boutons ou être l'ambassadeur de tous les dispositifs et programmes qui sont mis en place.
[CB] C'est ça. C'est parfaitement résumé. En fait, il fait un peu l'étoile, le manager, quelque part.
L'exemplarité, ce qu'attend un collaborateur, c'est avoir un manager, un président, un directeur général : exemplaire.
[GG] Et on en vient, me semble-t-il, au deuxième prérequis à vos yeux, qui est le rôle des dirigeants, surtout de la stratégie du bien-être.
[CB] Tout à fait. Le rôle d'exemplarité, le rôle également de sponsor. Le storytelling est quelque chose de très important. Il n'y a rien de mieux quand on écoute quelqu'un, quand il parle de sa situation personnelle, pour que cela nous parle. S'il n'est pas convaincu de ce qu'il dit, ça ne touchera pas la personne. Donc, il n'y a rien de mieux que cela.
Et puis, à partir du moment où vous avez également, même s'il a la pudeur de ne pas vouloir en parler, cette volonté de dire, moi, je voudrais que dans un accord d'entreprise, parce que ça arrive dans les accords d'entreprise, qu'on puisse mettre des jours en plus pour des personnes qui accompagnent un enfant malade, un proche en fin de vie, etc. C'est aussi une volonté.
[GG] Oui, tout à fait. Et c'est sur le sujet de la cohérence globale, peut-être parfois où ça prime, c'est que, en tout cas de ce que je peux voir et là où on tente d'accompagner, c'est qu'une entreprise est parfois compartimentée sur ces sujets-là. C'est-à-dire que peut-être que le service RH va travailler sur mettre en place des jours en plus, le service médecine au travail va travailler sur un autre sujet, l'assistante sociale va avoir la capacité d'aider sur les démarches administratives de ce même sujet, le responsable handicap va les refaire. Et donc, finalement, un salarié qui a cette problématique, comment est-ce qu'il a à un seul et même endroit l'information ? Est-ce qu'il a déjà les supports, mais qui remet tout par rapport à un événement de la vie ? Là, on est sur la cohérence d'une stratégie de bien-être.
[CB] Oui, et c'est là où il faut structurer en fait sa stratégie en mettant des procédures en place, des outils également.
[GG] Dans notre dernière enquête bien-être employeur, on leur a demandé si les dispositifs qu'ils mettaient en place sur les sujets de bien-être étaient pertinents pour leurs salariés. Alors, je sais qu'à 59%, ils nous ont dit, oui, c'est pertinent. Et en fait, on a posé exactement la même question aux employés lors d'une autre enquête et eux, sauf erreur, mais je pense que c'est 27%, nous ont dit, oui.
C'est-à-dire qu'on a un gap de 30%, de 32, donc c'est bien ça les chiffres, on a un gap de 32 points.
Et alors, en tout cas, moi j'y vois deux choses. La première, c'est que peut-être que ça ne correspond pas aux besoins. Et donc là, on a répondu, il y a des dispositifs qui sont mis en place, mais ce ne sont pas les attentes des salariés. La deuxième, c'est que c'est méconnu.
[CB] Il y a les deux. Je pense que majoritairement, c'est méconnu, à part des grands groupes qui font toute cette publicité, etc. Pourquoi les grands groupes, je cite les grands groupes, parce que les grands groupes américains ont des objectifs là-dessus.
C'est comme le ratio femmes au niveau du conseil d'administration, etc. Ils ont des objectifs.
Donc, c'est plus facile parce que déjà, dans leur structure et dans les objectifs globaux de l'entreprise, ça descend dans les objectifs managériaux. Et c'est bien marqué dans l'objectif du manager.
Pour autant, quand ce n'est pas dans les objectifs d'une entreprise et ça ne descend pas dans l'objectif du manager, là, il y a une déperdition d'information et on ne sait pas où aller chercher l'information.
On a l'intranet. Est-ce qu'un intranet suffit ?
Est-ce que les collaborateurs ont tous accès à l'intranet ? Ce sont aussi des questionnements parce que vous avez peut-être dans les 27 % des gens qui sont uniquement des gens, entre guillemets, dit sédentaires, qui ont tous un ordinateur, alors que par exemple, en coopérative agricole, non.
Ils sont dans les silos, ils sont dans les ateliers.
Et comment on va les capter ? Comment est-ce qu'on va capter cette population ? Et donc, là, c'est une autre difficulté.
[GG] Justement, si je revenais sur, il y a des prérequis avant toute mise en œuvre et tout dispositif, toute action, le rôle central des managers et il va falloir les accompagner et il faut les accompagner, deux, les dirigeants qui doivent être réellement engagés dans ce sujet. Qu'il y ait des objectifs ou non, mais en tout cas, on remarque que quand il y a des objectifs, quand il y a des variables qui sont offertes, si la politique de bien-être est efficace, on voit que dans la réalité, il y a des effets. Je mettrais quand même peut-être une petite parenthèse avec les enquêtes d'engagement, ça, c'est un autre sujet, on ne va peut-être pas rentrer là-dessus.
[CB] C'est vrai.
[GG] Mais ça ne va pas être le sujet d'aujourd'hui. Il y a un troisième prérequis avant qu'on rentre dans le sujet de qu'est-ce qu'il faut mettre en place et quelles sont les priorités ?
[CB] Je ne vois pas spécialement de prérequis plus que ça. L'entreprise essaie de faire ce qu'elle a à faire et ce qu'elle peut faire. Le salarié a également non seulement des droits, mais il a aussi des devoirs.
Derrière, il faut un peu forcer les choses en tant qu'employeur pour pouvoir faire en sorte que ça fonctionne et que ça aboutisse.
[GG] Par rapport à ça, d'ailleurs, ça me fait penser de part toujours vos différents parcours professionnels. Est-ce que vous voyez justement une différence de ce qu'on peut faire là dans le monde agricole ou par rapport à d'autres secteurs d'activité dans lesquels vous avez pu travailler ?
[CB] Non, je crois que là, on a affaire à des zones, donc là, que ce soit la souffrance dans une entreprise ou la souffrance dans une autre entreprise est la même.
Les métiers sont différents. En revanche, effectivement, là, il va falloir faire une attention particulière en fonction des métiers parce qu'évidemment, dans le monde agricole, vous avez des métiers durs avec des conditions de travail difficiles. Par exemple, en collecte, il y a beaucoup de poussière, il y a le travail très tôt le matin. La viticulture, c'est pareil.
Les métiers physiques, comme d'autres métiers physiques, je dirais, il n'y a pas que l'agriculture qui est un métier physique. Et la problématique sera différente, gérer des gens qui sont en fonction transverse, en fait, ce qu'on appelle les fonctions support, entre guillemets.
[GG] En fait, vous me faites penser à ça, je vous donne un chiffre. On a sorti notre baromètre absentéisme.
[CB] Oui, j'ai vu.
[GG] Vous l'avez vu. En début de mois, et en fait, ce qu'il en ressort, c'est qu'il y a à peu près, un petit peu plus même, un tiers des arrêts qui sont dus à des sujets psychologiques et beaucoup plus quand on est dans le secteur tertiaire.
[CB] Et oui.
[GG] Une fois qu'on s'est dit ça, ce n'est peut-être pas la priorité. Ma question est la suivante.
Si on pensait alors, pour nous, le bien-être, c'est un peu l'équilibre entre quatre dimensions : la santé physique, la santé mentale, émotionnelle, la santé sociale, le bien-être social et le bien-être financier.
Est-ce que pour vous, il y a une dimension qui est plus importante que l'autre ?
[CB] Non, c'est générique. Cela étant, il y a le sociétal aussi.
Son positionnement par rapport à la société et qu'est-ce que nous faisons au sein de la société.
Parce que vous avez des gens qui sont engagés aussi.
[GG] Nous, ça alors rentre dans le social, effectivement. C'est un peu sa raison d'être et comment on se retrouve avec ces valeurs de son entreprise et par rapport à comment on se trouve aujourd'hui dans la société.
[CB] Pour moi, le social, c'est ses amis proches, sa famille, etc.
[GG] Ok, j'entends. Maintenant, je pense que tout y est.
[CB] Tout cela sert. Il faut avoir plusieurs pieds à son tabouret et s'il y en a qu'un ...
Alors tant qu'on garde quatre, ça peut aller. Quand on commence à aller à trois, à deux, ça devient dangereux, effectivement.
[GG] Jusqu'où doit aller un employeur sur le sujet de la santé physique ? Parce que, j'allais dire historiquement, mais c'est aussi avec la réglementation, On était à santé, sécurité au travail, hygiène environnement, santé environnement. Donc beaucoup sur, finalement, la santé physique au travail, éviter les maladies professionnelles, améliorer la qualité de vie au travail, mais aussi vraiment la santé, sécurité au travail. Est-ce que vous faites partie de ceux qui pensent qu'on doit aller plus loin sur l'hygiène de vie, sur les dépistages de maladies redoutées ?
[CB] Alors oui, moi je fais partie de ces gens sur notamment le dépistage des maladies redoutées.
Puisque quand, dans certains métiers, vous touchez à des produits, il est quand même nécessaire de faire ce type de dépistage. Mais après, je reste très attentive, et c'est là où on est dans l'ambiguïté, c'est aussi l'acceptation du collaborateur, ici on touche à sa personne. Est-ce qu'il va l'accepter ?
C'est là où il faut faire attention. Il faut amener ça tout en douceur en disant, il existe cela, il serait bien de, etc. Et ne pas aller dans la brusquerie, ne pas aller dans l'obligation de, parce que c'est gênant.
Je prends un exemple, l'alcoolisme, la prise de stupéfiants. Libre à lui de faire ce qu'il veut, mais quand c'est pris dans l'entreprise et que ça devient dangereux pour lui ou pour un autre collaborateur.
Par exemple, il conduit un Fenwick, il est sous l'emprise de l'alcool, ou il est commercial et sous l'emprise de l'alcool : ici, cela devient un problème pour l'entreprise.
[GG] Oui. On remet le cadre réglementaire avec peut-être ouverture à un moment donné, de faire de la sensibilisation au collectif, peut-être pour qu'il y ait un tilt et d'arriver à du personnel.
[CB] Après, ça peut être un traitement individuel, mais c'est dommage d'en arriver là. L'alcoolisme reste une maladie, on le sait. Il suffit d'un accident, il suffit qu'il arrive quelque chose de grave et on se retrouve à licencier le collaborateur. La question est, qu'est-ce qu'on aurait pu faire et qu'est-ce qu'on a raté ?
À part la sensibilisation, mais s'il ne veut pas se soigner, on ne peut rien faire.
[GG] Alors, on peut peut-être faire en se disant que, si on vient sur les autres dimensions, peut-être qu'il a un sujet de bien-être financier qui le préoccupe et peut-être que là on pourrait aller l'aider. Pourquoi je vous dis cela, c'est qu'on voit bien que les personnes qui ont un sujet de problème émotionnel, donc vraiment anxiété, stress, dépression, etc., consomment beaucoup plus de substances que les autres, idem pour le bien-être financier. Les personnes avec justement des imprévus financiers, qui n'y arrivent pas, ils n'arrivent pas à combler leurs fins de mois, sont beaucoup plus à même d'avoir des addictions, d'être addictifs à des substances.
[CB] Et l'entreprise va faire comment, là ? C'est la question.
[GG] C'est la question.
[CB] À part mettre en lien la personne avec une assistante sociale qui va, elle, avoir l'autorisation de rentrer dans la vie personnelle du collaborateur, chose que l'employeur n'a pas le droit. C'est compliqué, parce qu'il ne faut pas tomber aussi dans la situation en disant qu'il a des problèmes financiers. Est-ce qu'il sait gérer son argent ? Est-ce qu'il a un prêt qui est trop lourd et ses revenus sont trop bas ?
Et pour autant, est-ce qu'il faut l'augmenter, quitte à mettre en péril toute une masse salariale et toute une équipe ?
[GG] Oui, on va peut-être plus parler ici de fonds d'urgence, voilà, d'autres solutions qui sont hors rémunération. Et donc là, d'aller voir tout ce qu'il peut y avoir en face. Oui, tout à fait. On le voit bien, c'est vraiment un cercle, j'allais dire, et vicieux quand on est dans cette problématique et vertueux quand on accompagne sans avoir isolé une problématique en disant, on va faire ça sur du long cours.
Là, tout de suite, on ne vise personne, on ne vise pas une personne qui est en situation d'alcoolisme, on ne vise pas une personne qui est en situation de problématique financière, mais on sait qu'en mettant en place ces dispositifs-là, d'ici deux ans, trois ans, quatre ans, en ayant une vision à long terme, cela va pouvoir en aider plusieurs, parce que de toute façon, on le sait, on en a beaucoup plus que ce qu'on ne pense, qui sont concernés par des problématiques émotionnelles, des problématiques financières, etc.
[CB] Oui, tout à fait.
[GG] Donc, peut-être pour finir, j'en ai peut-être une ou deux questions.
La première, c'est comment on pilote tout cela et comment vous vous faites pour avoir une vision à long terme sur le sujet et non juste en fait des actions ponctuelles où ça ne se remet pas finalement dans une cohérence globale ?
[CB] Oui, puis les actions ponctuelles, on s'aperçoit qu'elles restent ponctuelles et elles sont traitées sur une urgence et ce n'est pas toujours très apprécié. Non, il faut travailler sur une politique sociale, globale, qui est menée en fait par toute une équipe, une équipe de direction, et cette politique sociale va prendre des pans de certaines choses pour pouvoir accompagner. Alors, il n'y a pas que le social, il y a aussi dans beaucoup de sociétés, vous avez cette partie RSE va aider l'entreprise à mettre des plans d'action.
D'ailleurs, on le voit de plus en plus, la RSE est quand même bien suivie et bien présente, que ce soit par le gouvernement, par les banques avec des obligations, des PEF et j'en passe, qui vont aider en fait l'entreprise à mettre des petits outils en place, petit à petit, et puis les déployer et en faire quelque chose de génial.
[GG] Je pense effectivement que le succès est de mettre autour de la table toutes les parties prenantes.
On se parlait là de la RSE, mais il y a peut-être un monsieur ou une madame inclusion, équité, diversité, qui ne travaillent pas forcément ensemble, les RH, la médecine du travail, l'assistance sociale, le responsable handicap, et puis la voix des collaborateurs aussi. Les IRP, bien sûr, et de se mettre tous ensemble et de se dire, ok, qu'est-ce qu'on fait tous sur tel ou tel sujet et comment est-ce qu'on peut réunir le tout, que ce soit cohérent, c'est quoi notre vision à long terme, quel type d'employeur on veut être sur tel ou tel sujet, et donnons-nous des étapes, cinq ans, six ans, voire plus.
[CB] C'est cela, mais je pense qu'on est un peu maladroit, en général dans les entreprises. Alors je ne fais pas du général, mais je dis bien en général parce que c'est la majorité des entreprises, c'est qu'on se retrouve généralement dans une situation ponctuelle et on sort un outil parce qu'il y a eu cette situation, mais ça ne concerne qu'un ou deux individus. Est-ce qu'on va toucher tout le monde ?
Je pense qu'il faut qu'on apprenne à travailler beaucoup plus en amont en se disant, voilà, dans le panel des personnes qui sont autour de la table, qu'est-ce que je vis comme situation et là on va toucher plus large, quelle est la priorité d'abord pour régler tel ou tel problème, tel ou tel problème, tel ou tel problème ? Je pense qu'il faut faire ce travail en entonnoir plutôt que de travailler en pompier à l'urgence.
[GG] L'écoute. L'écoute, quels sont les besoins ?
[CB] C'est cela.
[GG] En conclusion peut-être, l'écoute, je vais reprendre cela parce que ça me semble être fondamental. L'engagement effectivement qu'il soit profond et à long terme d'une entreprise pour avancer sur ses sujets. Le ponctuel ne permettra pas d'avoir une vision pour l'employé, le salarié, où il peut se dire, tiens, mon entreprise est une entreprise qui m'accompagne sur tel ou tel sujet, parce que cela sera ponctuel et cela ne va pas rentrer dans l'image positive de la marque employeur et c'est cette vision à terme qui pourra permettre, si on en revient à la rétention des talents, l'épanouissement, l'attraction, etc.
Non, je pense que, et peut-être bien entendu une fois que cette feuille de route est écrite c'est quels sont les indicateurs de performance de cette feuille de route : pouvoir le piloter ensuite et pouvoir mesurer l'efficacité pour rester toujours un peu agile et flexible par rapport aux attentes qui peut-être une année vont être sur tel ou tel sujet, parce que c'était l'année des réformes des retraites, donc tout le monde pensait, on a besoin d'être axé sur le financier, l'année prochaine ça sera autre chose, je vous laisse la conclusion.
[CB] Merci pour ce résumé, mais il y a aussi un devoir, une obligation que les entreprises, RH, membres RSE, etc., doivent faire, c'est tout ce qu'on appelle du benchmark, regarder ce qui se passe ailleurs, à côté ou dans d'autres pays, il y a souvent de très bonnes idées qui peuvent être mises en place sans réinventer la poudre, donc je pense qu'il faut être toujours curieux et être en veille de ce qui se passe à côté.
[GG] Cela sera notre conclusion.
[CB] Très bien, merci.
[GG] Merci Caroline.
[CB] Merci également.
[JD] Merci pour votre écoute, nous espérons que cet épisode vous aura inspiré.
Ensemble, continuons d'en parler pour cultiver le bien-être et la prévention.
Nous vous donnons rendez-vous très vite pour un prochain épisode.
D'ici là, n'hésitez pas à vous rendre sur notre site internet www.wtwco.com, nous serons ravis de vous accompagner.